L’univers Orphéon

Histoire d'amour depuis 1966

Il est passé des planches aux pages blanches, le Président se confie…

Alain Pillisser et l’Orphéon, c’est une histoire d’amour passionnée depuis 1966. Il en est devenu le président en 1995. Il écrit les textes de chaque revue annuelle, successeur des revuistes qui se sont succédés « à la plume » depuis 1861 : « Monsieur de Forceville, André Biebuyck et, bien sûr, Eugène Poret ! Celui-ci était mon beau-père et a fait cinquante revues ; j’en suis à ma seizième et j’aimerais avoir le centième de leur talent ! Mais l’humour a changé et l’attente du public aussi : aujourd’hui, au bout de dix minutes, les textes d’antan provoqueraient un mortel ennui ». La recette du succès, Alain Pillisser a su la trouver : « Avant, la Revue était très hazebrouco-hazebrouckoise. On charriait le maire, le bedeau, le pharmacien. Elle a évolué en reculant l’horizon, en faisant rire de l’actualité nationale, en se moquant des travers des couples, des familles, des amis… Chacun y reconnaît quelqu’un… pour éviter de se reconnaître lui-même ! » A l’époque, chaque saison accueillait 3 500 spectateurs. Ils sont plus de dix mille actuellement. Les ingrédients du succès se mitonnent aussi en famille. Rodolphe, le fils d’Alain, a débuté sur scène à l’âge de six ans ; il incarne quelques-uns des personnages du spectacle, dont il est l’actuel metteur en scène exigeant et respecté. Evelyne, l’épouse, toujours affairée à l’Orphéon, est d’abord la première lectrice des textes. Alain la surnomme le « comité de censure ». Dans la revue, on trouve aussi Christophe, le frère d’Alain, Virginie (l’épouse de Rodolphe), et désormais Sacha et Lisa, ses petits-enfants.

La passion d’Alain Pillisser demeure intacte : « Gérer ce théâtre est une responsabilité et une mission : celle de le faire perdurer. » Après son grand-père et son père, Rodolphe sera-t-il le prochain revuiste ? « C’est mon vœu le plus cher ! », avoue-t-il.

Histoire d'amour depuis 1966

Rejoignez la troupe à votre tour

Et ça dure depuis 1861 !

On trouve des traces d’embryon de revue en 1861 : des soirées mêlant comédies et chansons ont été découvertes, avant qu’en 1904 apparaissent les « revuettes » d’Isaïe Forceville. C’est André Biebuyck, inspiré par les revues parisiennes dont il était friand, qui glisse le concept dès 1914 avec « Hazebrouck – revue … & corrigée », entre chansons, courtes pièces en un acte et… « Salut à la bannière » pour les 60 ans du Cercle Musical de l’Orphéon.

En décembre 1917, les locaux sont détruits par les bombardements. La Revue réapparaît au collège Saint-Jacques en 1920 puis dans la nouvelle salle inaugurée en 1923. On ne parle pas alors de théâtre mais de salle des fêtes du Cercle Musical. Au fil du temps, une revue est proposée chaque année, ou un an sur deux ou trois…

En 1938, les bouleversements internationaux alimentent la revue « Avec un peu d’sauce… ». On rit même d’Hitler dormant à Schönbrunn sans imaginer les cataclysmes à venir. Il faut attendre juin 1946 pour retrouver le spectacle : « Haz ‘brouck s’en va-t’en guerre ! » est jouée sept fois au mois de juin. André Biébuyck décède en mars 1954 à 68 ans, laissant une quinzaine de revues derrière lui. « La revue des revues » lui rend hommage en 1955 puis, dès 1956, Eugène Poret passe à l’action avec « Hazebrouck… mon village ». Combien en écrira-t-il ensuite ? En 1997, il disait en être à sa trentième… Amoureux inconditionnel de la Flandre, il ne cesse de la mettre à l’honneur, se moquant de l’intrusion de la modernité, reconstituant les tableaux de grands maîtres, s’accrochant à la langue flamande… Les revues portent des titres farfelus ou aléatoires : « Y faut savoir el dire », « Contourne et rit ! » « A qui le tour ? » (dont l’affiche fit sensation dans la vitrine des pompes funèbres), « Hazebrouck à lune… issons ». Le 3 décembre 2002, l’émotion submerge la ville d’Hazebrouck qui apprend le décès d’E. Poret, âgé de 94 ans, avec une carrière de 79 années d’Orphéon !

Alain Pillisser travaillait déjà aux textes de la revue avant 2002, histoire de les moderniser… parfois au grand dam d’Eugène ! 2003 : « Les feux de l’humour » projette le show dans la modernité, mais rend également un émouvant hommage à celui qui vient de quitter les coulisses. Puis, chaque année, la Revue trace sa route, à la fois en fidélisant plus de dix mille aficionados et en ouvrant ses centres d’intérêt à ce qui fait rire ici et ailleurs, à la maison ou sur la planète Mars ! La technique évolue à grande vitesse tandis que le théâtre se modernise : jeux de lumière et installations sonores de qualité professionnelle, nouveau hall, ventilation de la salle. Seule la Tabagie (le bar du théâtre) demeure le témoin de décennies de passion, de joies, de colères, de bonheur. Si ce lieu pouvait parler…

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